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Une rencontre et un hommage à Antoinette Spaak, ministre d’État

L’Association des anciens parlementaire francophones a tenu à inviter Antoinette Spaak, ministre d’État, première femme présidente d’un parti politique en Belgique et ancienne présidente du Parlement de la Communauté française.

Notre président, Michel Foret, lui rend d’abord un hommage appuyé ; soulignant six personnalités auxquelles elle est associée : Paul-Henri Spaak, son père, ancien Premier ministre socialiste ; Lucien Outers, son lanceur en politique ; André Lagasse, son « bureau d’études » comme elle me l’avait confié, il y a longtemps ; Jean Gol et la création de l’alliance PRL-FDF ; Simonne Veil, amie et présidente du Parlement européen et bien sûr Étienne Davignon, ministre d’État lui aussi, d’ailleurs, compagnon de vie, sans mariage « pour ne pas devenir comtesse » dit-elle avec humour.

Soulignant les « très grandes qualités » d’une « vraie femme d’État », le président souligne combien Antoinette Spaak a une vision à long terme pour Bruxelles, sa ville, mais aussi bien sûr pour notre Communauté française et pour l’Europe.

Antoinette Spaak, dit-il, se positionne comme une femme de gauche, rieuse, sérieuse et jamais ennuyeuse. « Madame, on vous apprécie et nous sommes heureux de vous recevoir ici ! ». Invitons toutes et tous à lire son livre réalisé avec la complicité du journaliste Francis Van de Woestijn.

Antoinette Spaak prend ensuite la parole et entame son intervention en soulignant combien dans sa jeunesse elle était entourée de tant de talent tout autour d’elle : sa mère, son père, sa famille créatrice et artistique.

La guerre et ses souffrances lui ont fait comprendre l’horreur des dictatures et l’amour de la démocratie… Et là, le souvenir « du bruit de la porte de prison de Saint-Gilles où nous habitions (son père a été bourgmestre de cette commune bruxelloise), porte qui se refermait sur nous quand ma mère y a été retenue pendant un mois… »

Souvenir aussi : cette femme de rexiste qui  a averti ma mère que nous devions notre mère et nous quitter notre appartement dans les cinq minutes, car elle avait entendu au travers d’une porte qu’on venait pour nous arrêter. « Ma mère nous a emmené dans un refuge jusqu’à la libération. Nous y avons vécu un mois ; nous étions si surpris qu’elle avait calmement aménagé ce lieu, sans en informer ses enfants ; ma mère était quelqu’un de positivement tout à fait hors norme. »

Et la Question royale et les attaques incessantes de La Libre Belgique contre mon père Premier ministre. Et le rappel de cette phrase prophétique de Chateaubriand dites par le Premier ministre : « Sire, votre fils est mon roi. » Ceci rappelé par Antoinette Spaak, qui se dit républicaine.

A la fin de sa vie, P.-H. Spaak a quitté le Parlement et donc le groupe socialiste sur la question de l’OTAN. Il était favorable à une défense basée sur les démocraties, le PS était contre l’OTAN. Après cette période il a rencontré des hommes politiques flamands, comme Hugo Schiltz, il en est sorti horrifié, mais aussi ébloui devant leur détermination. C’est ainsi qu’il a soutenu pour l’élection de l’Agglomération de Bruxelles en 1970 la liste menée par le Pr Van Ryn, avec Lucien Outers et André Lagasse, celui-ci en devenant le Président. Le « Rassemblement Bruxellois » a gagné ces élections, et il nous faudrait revenir sur ce qui fut la première institution qui a créé le « sentiment bruxellois », et par exemple ses positions urbanistiques nouvelles grâce aussi à Serge Moureaux, qui y fut échevin de l’Urbanisme.

Son père meurt en 1972. Et c’est en 1974 qu’elle se présente pour la première fois en devenant membre du FDF avec la force de conviction de l’homme intellectuel, écrivain, hors norme que fut Lucien Outers. Avec André Lagasse, ils forment alors à trois le triangle de fer de la lutte francophone nécessaire.

Durant sa présidence de parti les réflexions moqueuses ou négatives furent très nombreuses. Tant de critiques tant de moments difficiles pour une première politique. Ce fut lourd à porter. Mais l’évènement est aujourd’hui salué très positivement. Lucien Outers, grand orateur, deviendra président. On se souviendra du disque vinyle qui reprend ses discours et les chansons de Pauline Julien, la Québécoise indépendantiste.

Puis, ce fut l’alliance PRL-FDF avec une mise en place visant la défense des francophones, alliance devenant MR et qui fut rompue il y a quelques années…

Antoinette Spaak fut aussi Présidente du Parlement de la Communauté française, suite à des négociations menées par Philippe Moureaux et qui rassemblèrent dans un premier temps PS, FDF et Ecolo pour aboutir dans les années 80 à une majorité PS, PSC et FDF. De la négociation il resta toutefois un groupe commun ECOLO-FDF, où la présidente du Parlement, « le meilleure moment de sa vie politique », nous dit-elle, siégeait dans la majorité, tandis que l’aile ECOLO (et donc le chef de groupe technique, l’auteur de cet article !) siégeait dans l’opposition. Époque politique lointaine, révolue.

L’intervention d’Antoinette Spaak, vu le temps ne put se développer comme cela aurait pu l’être. Cette partie importante de la vie francophone de notre Communauté est donc à découvrir dans le livre réalisé avec Francis Van de Woestijn.

Henri Simons